Ce matin, à la radio, j’entendais un chercheur de l’Université McGill expliquer le résultat de ses recherches sur les anti-oxydants.
Depuis plusieurs années, on associe la présence de radicaux libres au vieillissement. Les anti-oxydants, nous avait-on dit, capturaient les radicaux libres et ainsi ralentissaient le processus du vieillissement. Alors toutes sortes de régimes de santé et de produits naturels ont profité de cette conclusion.
Or, selon cette dernière étude, il semblerait que les radicaux libres pourraient être une conséquence du vieillissement et non pas sa cause. Le vieillissement naturel libérerait des radicaux libres et ceux-ci n’en serait pas la cause. En s’y attaquant, on viserait donc la mauvaise cible.
Dans l’approche préconisée par la médecine face à la maladie, ce ne serait pas la première fois que l’on confond causes et conséquences.
Dans notre société, nous nous attaquons d’abord et avant tout aux symptômes, les considérant comme l’ennemi à combattre, alors qu’ils ne sont très souvent que la conséquence d’un problème se situant ailleurs. Si un enfant fait de la fièvre, le problème ce n’est pas la fièvre, à moins qu’elle ne dépasse 42. La fièvre est un moyen pour le corps de combattre une infection virale ou bactérienne. On ne résout donc pas le problème en combattant les symptômes, en fait, dans certains cas on pourrait même détériorer l’état de la personne en agissant ainsi.
Le même phénomène s’observe dans différentes sphères de notre société. On met beaucoup d’emphase, par exemple, sur les problèmes des urgences dans les hôpitaux, ajoutant toutes sortes de ressources administratives pour « mieux gérer » le temps du personnel infirmer et des listes d’attente, or le problème fondamental se trouve probablement ailleurs.
Dans ma région, on a bâti un énorme CLSC qui dessert toute la région. Sauf que le CLSC ferme à 20h tous les soirs et est fermé durant le weekend. Si vous voulez rencontrer un médecin, sans rendez-vous, vous devez également vous présenter tôt en début de journée et prendre un ticket. À 8h30, le matin, tous les rendez-vous d’urgence sont déjà donnés pour la journée. Répétez ce processus de région en région et tous ceux qui ont un problème médical, pas nécessairement extrêmement urgent, mais qui nécessite tout de même des soins, se retrouveront à l’urgence de l’hôpital. Il y a, par ailleurs, davantage de médecins de famille aujourd’hui qu’il n’y en avait autrefois, sauf qu’on devrait compter non pas le nombre de médecins, mais le nombre d’heures de médecine familiale. Il y a plus de médecins aujourd’hui, mais ceux-ci font moins d’heures, parce qu’ils veulent en consacrer davantage à leur propre famille ou leur activités personnelles. Mais le problème, entend-on, ce sont les urgences. Disons plutôt que les symptômes les plus apparents sont là, parce qu’on est en bout de ligne.
Il est évidemment beaucoup plus facile de s’en tenir aux symptômes. Ils sont apparents et on peut donc s’y attaquer facilement. On peut également mesurer les résultats selon que les symptômes ont disparu ou sont toujours présents.
Vouloir régler le problème à la source est plus complexe, demande du temps, de la réflexion et les solutions mises en place à un bout de la chaîne auront potentiellement des résultats uniquement à l’autre bout de la chaîne, ce qui est beaucoup plus abstrait dans certains cas. Nous vivons par ailleurs, dans un monde où on s’attend à ce que les problèmes soient résolus rapidement. C’est le miracle de la pilule magique.
On oublie souvent que les problèmes ayant mis beaucoup de temps à devenir apparents, prennent généralement beaucoup de temps à être pleinement résolus et encore faut-il qu’on ait le courage, la patience et l’énergie d’en chercher l’origine fondamentale.